
juillet 10, 2025
Que se passe-t-il quand les proches aidants de longue durée prennent de l’âge?
Les parents qui ont des enfants présentant des troubles du développement ou des maladies chroniques graves sont proches aidants à vie. Cette dynamique familiale est parmi les plus exigeantes, surtout lorsque les proches aidants vieillissent. Ceux-ci vivent souvent avec la personne qu’ils soutiennent et qu’ils soignent, même lorsqu’ils ont eux-mêmes besoin d’aide. Une telle situation augmente les risques pour les deux parties.
Autrefois, on exerçait peu ce rôle
Dans les générations antérieures, les familles qui avaient des enfants adultes nécessitant des soins les plaçaient souvent dans des institutions plutôt que de s’en occuper à la maison. Aujourd’hui, on sait que vivre en institution n’est pas idéal, donc cette pratique est devenue moins courante. Cette réalité confie aux familles la responsabilité totale d’un accompagnement à long terme, ce qui n’est pas non plus idéal. Les familles font donc face à d’importants obstacles lorsqu’elles doivent accompagner les personnes en situation de handicap et leurs proches aidants. À mesure que les aidants vieillissent, ces obstacles peuvent devenir dangereux pour toute la famille.
Quels en sont les risques?
- Risque accru de pauvreté. De nombreux proches aidants de longue durée quittent leur emploi rémunéré pour fournir des soins à temps plein. Ils peuvent aussi abandonner des postes mieux rémunérés au profit d’une plus grande flexibilité. Avec l’âge, cette perte de revenu à long terme se traduit par une épargne-retraite moindre et une contribution réduite au Régime de pensions du Canada (RPC). Le risque de pauvreté est élevé chez les personnes en situation de handicap et les proches aidants de longue durée au Canada. Ils doivent surmonter l’instabilité du logement, l’insécurité alimentaire et des soins médicaux insuffisants. Les personnes handicapées perçoivent des prestations très faibles. Cette réalité limite leur autonomie et les rend souvent dépendantes d’un membre de la famille pour se loger et répondre à leurs besoins essentiels.
- Risques physiques. Les proches aidants de longue durée développent leurs propres méthodes pour s’occuper des tâches quotidiennes, telles que l’hygiène, l’habillage, le transport en fauteuil roulant ou la physiothérapie. En vieillissant, ils peuvent ne pas se rendre compte que leur capacité à accomplir ces tâches diminue. Même s’ils en ont conscience, ils n’ont pas accès à une aide supplémentaire qui pourrait leur faciliter la vie. Sans avoir recours à une aide extérieure pour effectuer les tâches physiques, ces proches aidants sont exposés à de plus grands risques de blessures au fil du temps.
- Moins en capacité de gérer les tâches quotidiennes. La gestion des tâches quotidiennes, comme payer les factures, nettoyer la maison ou gérer la médication, peut devenir plus difficile et stressante lorsqu’un proche aidant commence à souffrir de problèmes de santé liés à l’âge. Par exemple, s’il ne peut plus conduire, il est plus difficile de se rendre aux rendez-vous médicaux. Habitués à prendre soin des autres, les proches aidants de longue durée peuvent avoir du mal à reconnaître qu’ils ont eux-mêmes besoin d’aide. Plusieurs problèmes restent donc sans solution.
- Un avenir incertain. Beaucoup s’interrogent avec inquiétude sur ce qui adviendra après leur départ. Si aucun autre membre de la famille ne peut ou ne veut reprendre la relève, le bénéficiaire peut vivre une grande détresse émotionnelle. Ils s’inquiètent avec raison : sans ressources financières suffisantes, cette situation peut s’avérer très difficile à gérer.
- Aucune sécurité absolue. Que se passe-t-il si un proche aidant âgé tombe gravement malade? S’il doit être hospitalisé, le bénéficiaire peut se retrouver sans recours ou encore s’il est incapable d’intervenir en cas d’urgence médicale, il peut en subir les conséquences. Souvent, les proches aidants de longue durée évitent d’évoquer leur situation qui se dégrade par peur d’être séparée de la personne qu’ils aident. Une dramatisation touchante illustrant un tel scénario est présentée dans la série télévisée québécoise Empathie, où l’un des personnages principaux refuse de demander une aide médicale pour soigner sa mère malade, par crainte qu’elle soit placée en institution. Le système de santé peine à repérer les proches aidants âgés en difficulté, en partie parce que des millions de Canadiens n’ont pas de médecin de famille.
Comment le Canada peut-il aider les proches aidants de longue durée prenant de l’âge?
Tous les proches aidants sont touchés par les lacunes de notre système de santé, telles que l’absence d’un plan national cohérent, le déficit d’aide financière et une reconnaissance encore trop limitée de la réalité des proches aidants. De telles failles s’accumulent et les conséquences s’aggravent chez les proches aidants de longue durée.
Voici comment mieux protéger les proches aidants âgés (et, par conséquent, les bénéficiaires) :
- Reconnaître la proche aidance à temps plein est un emploi en soi et offrir une compensation financière pour ceux qui ne peuvent pas maintenir un travail rémunéré en raison de leurs responsabilités.
- Investir dans des solutions de logement pour les personnes en situation de handicap afin d’offrir aux familles des solutions conciliant autonomie et accompagnement sur mesure.
- Augmenter les aides financières accordées aux personnes en situation de handicap afin d’élargir leurs options.
- Mettre en place des protocoles de santé communautaire pour surveiller les proches aidants à temps plein et les bénéficiaires susceptibles d’être en situation de risque et intervenir bien avant que le proche aidant atteigne un certain âge.
- Accroître l’accès aux soins à domicile.
- Fournir aux familles des services et des programmes de planification successorale pour que les prochains proches aidants soient prêts à reprendre la relève et qu’un plan soit mis en place pour soutenir le bénéficiaire.
Après des années de dévouement, il est injuste que les proches aidants âgés soient plongés dans l’incertitude. Ils ont droit à la tranquillité d’esprit et ils ont droit de savoir que leurs proches recevront les soins nécessaires et qu’ils pourront ainsi vieillir en toute dignité.