COMMENT LE SYSTÈME DE SANTÉ PEUT-IL SOUTENIR LES PROCHES AIDANTS LÀ OÙ ILS EN ONT LE PLUS BESOIN?

La santé des proches aidants est souvent compromise en raison de leur rôle, surtout lorsqu’ils assument des responsabilités importantes. Les données sont frappantes. À titre d’exemple, les conjoints qui agissent comme proches aidants font face à un taux de mortalité 63 % plus élevé que celui de leurs pairs non aidants. De plus, 75 % des proches aidants affirment reporter ou annuler leurs propres rendez-vous médicaux afin d’accompagner leur proche. Ils ont souvent une alimentation déséquilibrée, des troubles du sommeil et un niveau de stress plus élevé que la normale. Dans un système de santé déjà sous tension, les proches aidants permettent de combler certaines lacunes, mais à leur propre détriment puisqu’ils sont exposés à d’autres risques.

COMMENT LES PROCHES AIDANTS SOUTIENNENT-ILS LE SYSTÈME DE SANTÉ?

Sans les proches aidants, les Canadiens devraient dépenser des milliards de dollars supplémentaires chaque année pour les soins. Il faudrait aussi ajouter 8 millions de travailleurs de la santé pour occuper des emplois exigeants et peu rémunérés dans le système actuel. Une telle mobilisation engendre souvent un taux élevé de roulement. Un manque de ressources financières et de main-d’œuvre adéquates entraînerait une dégradation de l’état de santé de nombreux Canadiens ayant un handicap ou des besoins chroniques. Dans certains cas, les conséquences pourraient être graves. Bien que les proches aidants constituent une composante essentielle dans l’économie des soins, leur contribution demeure rarement reconnue.

Le point de rencontre entre proches aidants et le système de santé

Dans l’exercice de leurs responsabilités, les proches aidants sont le plus souvent en contact avec des professionnels de la santé qui les perçoivent comme des intermédiaires chargés de transmettre l’information et de s’assurer que la personne aidée respecte son traitement. En revanche, la santé du proche aidant n’est pas toujours prise en compte.

Pendant ces rencontres, les professionnels de la santé peuvent être les seuls à constater qu’un proche aidant a aussi besoin d’un suivi médical. Après tout, ils ont souvent tendance à reporter leurs rendez-vous médicaux.

LE RÔLE DE PROCHE AIDANT : UNE CONSÉQUENCE D’UN SYSTÈME DE SANTÉ DÉFAILLANT

La pénurie de professionnels de la santé, en particulier de médecins de famille, complique davantage l’accès aux soins pour les proches aidants. De nombreux Canadiens vivent dans des communautés où les listes d’attente s’étendent sur plusieurs années, ce qui laisse comme seules options les cliniques sans rendez-vous et les salles d’urgence. Il n’est donc pas surprenant que les proches aidants négligent leurs propres besoins lorsqu’ils arrivent à peine à soutenir la personne dont ils s’occupent. Dans un contexte où les professionnels de la santé travaillent au maximum de leurs capacités, il va de soi qu’ils ne peuvent pas toujours remarquer qu’un proche aidant néglige sa santé.

Un proche aidant qui a un médecin de famille a droit à un meilleur suivi, surtout si le bénéficiaire consulte le même médecin.

COMMENT LE SYSTÈME DE SANTÉ PEUT-IL MIEUX RÉPONDRE AUX BESOINS DES PROCHES AIDANTS?

Il peut être difficile de demander aux professionnels de première ligne de mettre les bouchées doubles. Ils sont déjà surchargés dans un système sous-financé où la demande est très élevée. Toutefois, il existe quelques mesures qu’ils peuvent mettre en place pour accompagner les proches aidants :

1. Accorder un titre aux proches aidants. Pour diverses raisons, beaucoup d’entre eux ne s’identifient pas comme tels. En sachant qu’ils ont un rôle précis et reconnu, ils savent qu’ils peuvent accéder à des ressources, entrer en contact avec leurs pairs et mieux comprendre les répercussions de ce rôle sur leur santé.
   
   
2. Diffuser de l’information sur le rôle de proche aidant. Afficher des brochures, des affiches et des messages numériques dans les établissements de santé peuvent sensibiliser le public à la réalité des proches aidants.
   
   
3. Leur demander comment ils vont. Les proches aidants sont habitués à ce que l’attention soit portée sur la personne dont ils s’occupent. Le simple fait de leur demander comment ils se portent leur rappelle que leurs besoins comptent tout autant.
   
   
4. Participer à la prescription sociale destinée aux proches aidants. Family Caregivers of BC a mis sur pied un programme novateur, appelé le Caregiver RX Program, qui fait partie du système de santé de la Colombie-Britannique. Il permet aux médecins de prescrire des services non médicaux aux proches aidants.
   
   

Il est essentiel d’améliorer les voies d’accès aux soins pour mieux rejoindre les proches aidants. Voici quelques moyens concrets d’y parvenir :

1. Améliorer les services de santé publique offerts aux proches aidants dans la communauté, en offrant, par exemple, des bilans de santé dans les foyers où des soins à domicile sont déjà prodigués. Bien que les proches aidants aient accès à des outils d’évaluation, ils supposent l’implication d’un médecin de famille. Ces évaluations, si elles étaient effectuées par d’autres professionnels de la santé dans des lieux accessibles, pourraient toucher un plus grand nombre de proches aidants.
   
   
2. Renforcer le rôle des pharmaciens qui les rencontrent plus souvent que d’autres professionnels de la santé. En procédant à ces bilans avec les proches aidants, les pharmaciens pourraient effectuer des évaluations de base et les encourager à prendre en charge tout problème relevé.
   
   
3. Assouplir les politiques de financement limitant l’accès à la télésanté. En ayant recours aux technologies de soins, nous pourrons soutenir de nombreuses communautés où la mobilité réduite, l’éloignement géographique ou les responsabilités de soins constituent des obstacles sur le plan médical. Bien que la pandémie ait révélé certaines préoccupations en matière d’équité, il existe des solutions pour surmonter ces barrières, comme le recours aux appels téléphoniques plutôt qu’aux appels numériques qui requièrent une technologie de pointe.
   
   
4. Avoir recours à des coordonnateurs de soins pour guider les familles dans le système de santé et faciliter leur accès aux ressources, bien qu’elles se concentrent souvent sur le bénéficiaire. Étant donné que les coordonnateurs de soins sont souvent en contact avec les proches aidants, ils pourraient aussi effectuer leurs bilans de santé.
   
   

Il est essentiel d’accroître la sensibilisation aux conséquences possibles du rôle de proche aidant sur la santé pour mieux mettre en lumière cet enjeu. Ce message doit aller au-delà des professionnels de la santé et toucher l’ensemble de la population. La majorité des Canadiens ont un proche aidant dans leur entourage et en reconnaissant les effets de ce rôle sur leur santé, nous serons plus enclins à les appuyer.